vendredi 3 janvier 2014

Le choix du mode de transport, un enjeu comportemental et psychologique


Premier projet de la thématique "les sciences humaines au secours de la population", l'étude du choix du mode de transport.
Comme nous le savons tous, l'usage généralisé de l'automobile est un fléau (pollution, congestion, accidents, coût global, dépendance énergétique, balance commerciale, etc.) et la plupart des grandes villes du monde (hors Opep disons) font ce qu'elles peuvent pour réduire le recours à ce mode de déplacement hélas inévitablement nuisible (même si la pollution était le seul problème, ne croyez pas que c'est réglé, voir ici).




La solution est de réduire le nombre de kilomètres parcourus en voiture en zone urbaines et péri-urbaines. Diverses déclinaisons de cette solution existent, sans développer on peut résumer à trois approches : soit on remplit plus les voitures (stratégie des Etats-unis) soit on oriente les déplacements vers d'autres modes (c'est ce qu'on fait essentiellement en Europe) soit on essaye de réduire le besoin de se déplacer et la portée des déplacements (une piste aux résultats un peu lointains, mais qui paraît idéale à certains, elle est assez discutée, un résumé ici).

Dans le contexte de Paris et de sa banlieue, la solution la plus consensuelle semble être de favoriser le report modal (le transfert de déplacements réalisés en voiture vers des déplacements réalisés avec d'autres modes moins nuisibles), j'ai du coup proposé à la RATP de réfléchir sur ces enjeux du point de vue psychologique, il s'agissait de :
  • Montrer que toute stratégie d'influence sur ces choix est surtout une stratégie d'influence sur les comportements. Il s'agit d'un très grand nombre de personnes et de choix très fréquents, mais après tout c'est bien la décision de chacun des individus dans son quotidien qui est la base du problème.
  • Comprendre quelles sont les dimensions qui favorisent le choix de la voiture :
    • Identifier la part d'attractivité due à ce mode lui-même et par contraste avec l'attrait des autres modes
    • Comprendre le processus de décision qui mène à la préférence pour la voiture dans l'esprit des individus.
  • Envisager et tester des pistes d'actions sur les comportements.

La RATP (son service "prospective") s'est intéressée à ce sujet et j'ai finalement réalisé ma thèse grâce à leur soutien, notamment financier. La partie compréhension et identification a été difficile et longue à travers une enquête et deux expériences mais a été finalement menée à bien, par contre la stratégie que nous avions envisagée pour peser sur les comportements n'a finalement pas pu être testée dans les délais du financement prévu, j'espère trouver un de ces jours les moyens pour relancer cette expérience.
Sans donner de détails la revue de littérature commence par montrer que les stratégies habituelles d'influence sur les choix modaux ne sont que peu efficaces car elles pré-supposent que le choix est rationnel, informé, centré sur les bénéfices de déplacements et qu'il évoluerait si les contraintes décisionnelles changeaient. En réalité le choix modal (comme de très nombreux choix) est surtout habituel, peu conscient, très mal informé et centré sur le sentiment de capacité à réaliser le déplacement, et bien sûr assez peu adaptable au changement..
Je ne développe pas ici, tout ça est déjà écrit, et on trouve un résumé comme la version détaillée en ligne si vous voulez en savoir plus, ici.
En tous cas, c'est ça le premier exemple d'utilité pour tous de faire de la recherche appliquée en psychologie : participer à comprendre le comportement de choix du mode de transport.
Notons qu'évidemment la question de l'utilité objective d'une telle recherche est finalement dépendante des intentions des pouvoirs publics en plus des enjeux de capacité à agir, mais c'est un autre problème..


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